Bureau du Prince [19 janvier]

Si le Prince avait encore était humain, il n'aurait sûrement pas fermé l'œil de la nuit. Mais, pour son plus grand bonheur, il était mort depuis des lustres et la torpeur avait parfois ses avantages. Il s'éveilla sur le canapé dans son bureau, la tête sous un des coussins à frange si particulier qu'il aimait tant. Évidemment, la moitié de ses jambes passait par-dessus l'accoudoir, et si on ne savait pas qu'il était Prince, on l'aurait pris pour n'importe quel quidam incapable d'aller jusqu'à son lit.

Mais voilà qu'une nouvelle nuit commençait et Ambrosius savait déjà son emploi du temps très chargé. Mettant de côté son inquiétude pour son infant, il se leva. Jetant un coup d'œil à sa tenue froissée, il remarqua que c'était impossible de recevoir des sujets accoutrés ainsi. Mais, en se retournant vers son bureau, il découvrit un ensemble d'habits propre et repassé, agrémenté d'un mot signé Lucretia. Qu'est ce qu'il ferait sans elle, elle était vraiment parfaite et il ne manquerait pas de la remercier quand il la croiserait. De plus, ce mot était la preuve qu'elle avait bien déposé les vêtements au jeune homme un peu perdu de la veille qui occupait l'étage avec sa petite infante. Il se changea rapidement, cachant ses vêtements de la veille dans un des tiroirs du bureau.

Connaissant la régente, elle devait attendre (presque) patiemment que quelqu'un daigne leur ouvrir l'entrée secondaire, dans l'humidité nocturne de la ville. C'est après avoir effectué quelques ablutions et avoir remis ses cheveux en place qu'il se dirigea d'un pas décidé vers la seconde entrée.

Par là

De là

Ambrosius entra en premier dans son bureau et alla s'installer dans un des fauteuils, laissant le canapé aux trois Trémères. Il s'installa bien au fond de ce dernier, croisant les jambes avec élégance. Il attendit que tout le monde s'installe confortablement.

« Souhaitez-vous boire quelque chose avant que l'on ne commence ? »

Le Prince déboutonna les quelques boutons de sa veste afin d'être plus à l'aise une fois installé dans son fauteuil. Il souriait toujours gentiment aux trois femmes en face de lui. Il appréciait la compagnie féminine et là, il était servi. Les deux apprenties d'Emily était ravissante chacune dans son style, mais ravissante quand même.

« Quant à votre remarque sur l'entrée secondaire Lady McGee, elle n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd. Je préférerais en effet que cette dernière soit gérée par un serviteur. Je vais réfléchir à cette question. »

Il se passa ensuite la main dans sa barbe, lança un regard malicieux aux jeunes femmes.

« On commence quand vous voulez. Enfin ... je veux dire que je te laisse la parole Victoria. Si jamais tu veux discuter de quelque chose de privé avec moi, n'hésites pas à le dire, Lady McGee et Miss Forester pourront t'attendre dans la pièce d'à côté. »

En effet, Ambrosius préférait les entretiens en privé mais il savait aussi qu'Emily tenait à y assister. Autant pour avoir confirmation des informations qu'elle avait reçues auparavant, que pour surveiller le comportement du Prince envers ses apprenties.

La régente s'exaspéra un peu en entendant que le Prince leur proposer à boire. C'était gentil, mais elles n'avaient évidemment pas le temps de prendre une collation. Le souverain n'avait peut-être que cela à faire, mais elle avait du travail, sans parler de Mary qui devait travailler sur les livres et Victoria qui devait aménager.

« Non Majesté, nous avons toutes trois un programme assez chargé pour cette nuit. Donc nous déclinons votre proposition. »

Emily ne fit, dans un premier temps qu'acquiescer à la remarque du Prince concernant la porte. Puis, elle se permit d'enfoncer le clou, montrant d'une manière toujours aussi stoïque son mécontentement.

La régente parlait et agissait toujours avec le même flegme qui lui été propre. Son inexpressivité faisait finalement tellement partie d'elle que le Prince n'y faisait plus du tout attention, comme toutes les personnes qui la connaissait depuis très longtemps.

« J'espère bien ne bientôt plus avoir à attendre devant cette porte. Je pense d'ailleurs que toute personne l'utilisant régulièrement sera d'ailleurs ravi de ne plus patienter pendant des heures. »

Elle ne put que confirmer la remarque du Prince pour rassurer Victoria. Elle ne se vexerait pas de devoir laisser un peu d'espace à sa nouvelle recrue.

« Oui, évidemment. Si vous devez vous entretenir d'affaire privée avec Monsieur le Prince, nous vous laisserons. Je ne doute pas que ce dernier saura se tenir de manière exemplaire en présence d'une jeune vampire. »

D'une manière plus ou moins subtile, l'enfant vampire venait à la fois de mettre en garde le Prince, mais aussi Victoria. Elle savait le Prince un peu dragueur et elle voyait très bien que Victoria été mignonne. Emily aurait préféré être le chaperon de cette rencontre jusqu'au bout. Mais elle ne désobéirait pas un ordre de son souverain.

Victoria se laissa volontiers guider jusqu'au bureau du Prince. Elle prit place sur le canapé en face de ce dernier. Elle se tenait bien droite. A tel point qu'on pourrait croire que la jeune femme possédait une excellente posture. En fait, elle était tout simplement tendue. La Trémère n'aimait pas spécialement ce genre d'occasion nécessitant un juste dosage d'étiquette. Une discipline qu'elle ne maîtrisait pas encore. Pourtant le Prince semblait tout faire pour la mettre à l'aise et se montrait même assez charmant. Cela même après un échange relativement tendu avec la Régente. Leur relation était solide pour qu'elle se permette ce genre de remarques sur un ton assez sec.

Lorsque ce fut à son tour de parler, Victoria hésita. Le Prince lui avait proposé à boire. Sa Régente avait refusé. Elle était un peu entre le marteau et l'enclume car elle avait bel et bien besoin d'un rafraîchissement. Malheureusement, ses goûts en la matière étaient très complexes et il était extrêmement peu probable que le Prince dispose de vitae qu'elle pourrait avaler. Si son visage montra une légère hésitation, la Nouveau-né se reprit rapidement.

- Je n'ai rien à cacher, Régente McGee. fit-elle brièvement avant de se tourner vers Ambrosius. Votre majesté, c'est un honneur pour moi de vous rencontrer. Je me nomme Victoria Hayes du clan Trémère, infante de Jeremiah Stevens de la Praxis d'Edimbourg. Je suis ici devant vous pour deux raisons. commença la jeune caïnite sur un ton professionnel. Elle n'hésitait visiblement pas à aller droit au but.

- Dans un premier temps, je vous demande humblement la permission de m'installer sur votre domaine. Les raisons de mon arrivée sur ce dernier sont principalement de nature professionnelle. En effet, le Royal Infirmary Hospital possède les meilleurs équipements d'Ecosse en matière d'hématologie, ma spécialité. Afin de progresser dans mes recherches, ces installations sont de toute première importance.

Victoria ne quitta pas le Prince des yeux. Elle était pendue à ses lèvres et à son bon vouloir. Un Prince possédait des milliers de raisons de refuser à un de ses semblables de s’installer sur son domaine. Que cela soit la surpopulation ou tout simplement... son bon vouloir. La Trémère était contente que la Régente soit présente en cet instant pour ajouter un peu de "poids" à sa candidature. 

Le Prince écoutait tranquillement la jeune femme. Il appréciait qu'elle ne tourne pas des heures autour du pot. Après tout il avait lui aussi un programme chargé. Emily pouvait dire ce qu'elle voulait mais son emploi du temps ne lui permettait même plus de sculpter ces derniers temps. Alors plus vite il expédiait les entretiens, plus vite il pourrait faire autre chose ... Quand elle eu fini, il la rassura rapidement :

« Enchanté Victoria et bienvenue sur la ville de Glasgow. Tu es bien évidemment autorisé à rester sur mes terres du moment ou tu y respectes les Traditions. »

Puis réfléchissant tout en parlant, il compléta sa réponse.

« Je ne connais absolument rien en hématologie, je te fais confiance si tu dis que les installations de Glasgow sont de bonne qualité. Tu m'en vois ravie. Comme tu l'as sûrement remarqué, je suis plus à l'aise dans le milieu artistique. »

La science était quelque chose d'obscure pour lui. Surtout la science moderne. Il connaissait très bien l'Anatomie, il en a besoin pour faire ses sculptures. Et il avait eu droit à un professeur des plus éclairé en la matière. Cela avait été un tel régal de travailler avec Leonardo et de pouvoir l'observer dessiner. Ambrosius mesurait évidemment la chance qu'il avait eue de rencontrer un homme tel que lui. Il regrettait même parfois de ne pas l'avoir étreint. Peut-être s'il l'avait connu plus jeune ? Mais sa capacité artistique aurait-elle été la même une fois transformé ? Aurait-il pu priver le monde de tableaux inoubliables pour garder son ami à ces côtés pour l'éternité ? Le Prince sorti de ses pensées et continua sa conversation.

« J'ai d'ailleurs, à la dernière visite d'Emily et Mary, proposer d'organiser une visite de ma galerie d'Art. Cela se passerait comme une sorte de fête privée entre caïnite. Je ne sais pas si cela t'intéresse, mais tu es invité. Je serais aux anges de vous voir toutes les trois chez-moi. »

En repensant à sa dernière conversation, il repensa à ce qu'il avait dit à Miss Forester, concernant sa visite à un de ses cours. Il savait très bien qu'il n'aurait jamais le temps ... Mais peut-être y arriverait-il un de ces jours.

« Je saute de coq à l'âne, mais as-tu commencé tes cours Mary ? Comment trouves-tu l'université ? »

Revenant à ce pour quoi les trois Trémères étaient ici, il se recentra sur la présentation de Victoria.

« Mais, je m'égare ... vous avez dit que vous étiez ici pour deux raisons quelle en est la seconde ? »

Emily resta des plus silencieuse durant l'entretien. Elle n'avait effectivement aucune raison d'intervenir pour le moment. Le Prince discutait toujours avec aisance quel que soit la personne en face de lui. Et une fois de plus, il montrait avec brio sa facilité de communiquer avec autrui. Alors qu'elle avait du mal à mettre les gens à l'aise lui y arrivait toujours rapidement. C'était une des qualités qui faisait de lui un bon Prince, malgré les trop nombreux défauts qu'il avait.

Victoria semblait elle aussi bien préparer à cet exercice et Emily s'en félicitait. Une fois de plus, elle accueillait quelqu'un des plus efficaces. Elle espérait tout de même que le courant passerait bien entre les deux jeunes vampires. Car il serait intéressant qu'elle puisse travailler ensemble de manière agréable. Au cours de sa non-vie, la régente avait de trop nombreuses fois travaillées avec des personnes qui n'avaient aucune envie de besogner avec elle et cette ambience était toujours délétère pour le résultat.

Gardant son visage fermé et ses expressions imperméables à toute réaction, elle suivait la conversation avec attention.

Victoria semblait s'animer et prendre confiance à mesure que la conversation avançait. Ambrosius était naturellement charmeur et ce n'était pas pour déplaire à la jeune Trémère. Valait mieux ça que l'inverse. Elle le gratifia d'un léger sourire lorsque ce dernier l'invita à visiter sa galerie d'art. La Nouveau-né avait implicitement refusé la boisson, elle ne se sentait pas de refuser cette invitation même si elle se doutait que cela n'était pas du goût de sa Régente. A défaut de côtoyer le Prince, cela lui permettrait sûrement de rencontrer d'autres membres de la famille et qui sait elle trouverait peut être une sorte de mécène prêt à payer toutes ses futures factures. La recherche coûtait cher, très cher.

- Ce sera avec plaisir votre majesté. Je ne manquerai cela pour rien au monde. Je ne peux cependant pas parler au nom de nous trois. fit-elle pour donner le change.

La scientifique ne faisait rien sans raison. Sa présentation n'était qu'une formalité qui aurait pu être effectuée à peu près n'importe quand en cinq minutes chrono. D'ailleurs après s'être introduite, Victoria aurait très bien pu couper court à cet entretien et retourner à ses occupations. Elle dépendait à présent de la Praxis de Glasgow. La parole du Prince était immuable. Il suffisait juste que l'information soit remontée aux oreilles des caïnites influents de la ville pour que sa présence soit « officielle » et connue de tous ceux fréquentant l'Elysium.

Cependant, la présence de Victoria en ces lieux avait un véritable but. Et c'était un assez gros morceaux. Elle jeta un léger coup d’œil à la Régente qui devait se douter de ce qui allait suivre. Mary en revanche n'était au courant de rien. La Nouveau-né attendit que le Prince et Mary échange quelques amabilités et que son attention revienne sur elle, pour se lancer. Elle n'était pas du genre à tourner autour du pot et ne prendrait que très peu de pincettes.

- Votre majesté. Si la principale raison de ma visite était de me présenter à vous en bonne et due forme, la deuxième raison est en rapport direct avec mon activité professionnelle. commença-t-elle avant de prendre une grande inspiration.

- Afin de mener mes recherches naturelles et surnaturelles, j'ai besoin d'un contrôle total sur les décisionnaires du Royal Infirmary. Il se trouve que j'ai un accès direct et facile à une de ces personnes. Ainsi, je vous demande officiellement la permission d'en faire un serviteur. Elle laissa sa demande faire effet quelques secondes avant de reprendre.

- Je me rends évidemment compte de la nature osée de ma requête... Cependant, je suis prête à vous exposer tous les avantages que vous-même et par extension la Camarilla pourraient tirer du contrôle d'un tel hôpital. Et je suis évidemment prête à payer le prix que vous estimeriez nécessaire en compensation de cette hypothétique faveur.

Victoria était consciente de l'énormité de sa requête. Elle venait à peine d'arriver en ville et se permettait déjà de demander une faveur. Elle espérait que son culot soit contrebalancé par la présence de ses deux supérieurs. De toute manière, la Trémère avait prévu un véritable exposé pour se justifier si jamais le Prince voulait en savoir plus. Elle espérait surtout que ce dernier accède directement à sa demande ou bien lui laisse l'occasion de s'exprimer...

Ambrosius, toujours aussi aimable, sourit gentiment à Mary quand elle lui répondit concernant ces activités à l'Université. Elle s'installait convenablement en ville, donc, pour lui tout devait bien aller. Il trouva, en regardant les deux jeunes vampires qui accompagnaient la régente, qu'elle formait une chanterie qui avait "de la gueule" comme on disait.

Puis, Victoria expliqua la seconde chose pour laquelle elle était venue ce soir.

*Ah ... ben voila une requête des plus intéressante.*

Le Prince écoutait maintenant Victoria avec attention. Ce qu'elle lui proposait était une demande assez particulière pour une nouvelle venue en ville. Il était rare que le soir de sa présentation un caïnite ose faire ce genre de sollicitation, surtout, qu'apparemment, elle ne souhaitait pas s'approprier le premier quidam qui passait par là.

Une ombre passa sur le visage du Prince. Ambrosius était normalement assez souple concernant la gestion de son royaume, mais trop de nouveauté d'un coup ne lui convenait pas non plus. Il aimait prendre le temps de réfléchir et bien peser le poids de ces actions.

« Oui oui, effectivement, c'est une requête assez osée surtout pour quelqu'un qui vient seulement d'arriver en ville. »

Ambrosius se gratta sa barbe, semblant réfléchir. Il n'avait aucune envie d'écouter les avantages qu'il pouvait en retirer. Il avait autre chose à faire de sa soirée, mais ... la jeune caïnites le proposer si gentiment et peut être que cela pourrait l'orienter sur un choix en particulier. Peut-être qu'il pouvait vraiment en retirer des avantages. Mais, même avec ses explications, cette demande émanait d'une personne qu'il ne connaissait absolument pas ...

Enfin, maintenant qu'elle était là, autant l'écouter. Le Prince s'installa un peu mieux sur son canapé et s'adressa à Victoria.

« Et bien ne te gêne pas, je serais ravie d'écouter ce que tu as à me dire, concernant ton peut-être futur serviteur ? Qui est-il ? Quel est son métier ? »

Le silence d'Emily et son immobilité la faisait quasiment passer pour une poupée en porcelaine. Elle n'avait même pas tiqué à l'annonce de Victoria. Même si la régente ne s'était pas montré des plus enthousiaste à cette révélation lors de leur entretien téléphonique.

Emily se pencha tout de même vers Mary et lui demanda d'une voix basse.

« Souhaitez-vous que nous allions dans la salle d'attente pour nous épargner cette conversation ou voulez-vous soutenir votre collègue ? »

Au moment où Victoria demanda "contrôle total sur les décisionnaires du Royal Infirmary", Mary abandonna son imitation pathétique de la Régente pour se tourner vers sa nouvelle camarade qu'elle foudroya du regard. Effectivement la conservatrice trouva sa demande "osée". Ce genre de conseil d'administration devait être contrôlé par un membre du Primogène, pas une jeune vampire inexpérimentée. Par ailleurs, aucun des deux Anciens ne semblaient comprendre les enjeux, mais dès qu'il les aurait compris le Prince pourrait décider de contrôler la plus importante réserve de vitae de la ville, aurait accès à des données importantes sur certains mortels locaux, voire d'un niveau national sans compter les bénéfices financiers.

Mary jugea que l'idée de s'emparer de l'hôpital était bonne, mais pas le fait qu'il soit géré en sous-main par une Acolyte. Là-dessus Emily sembla vouloir quitter le bureau, désintéressée par ce sujet d'importance. Miss Forester sourit gentiment à la Régente et lui répondit à voix haute, alors que la conversation restait suspendue quelques secondes.

"Oh non, je vais rester ici. Mais si j'avais su j'aurais pris le nom du recteur de l'université de Glasgow pour en faire mon servant, cela faciliterait également mon travail" , dit-elle sur un ton sarcastique non sans une fugace pointe d'humour. Elle se tourna vers le Prince pour lui proposer une autre solution.

"Votre Majesté, pourquoi ne pas accorder ce privilège à lady McGee en qui vous avez toute confiance? Ainsi miss Hayes pourra diriger cette goule en son nom sur son lieu de travail. Lady McGee ou Miss Hayes pourront vous communiquer régulièrement les avancées de ses recherches. C'est une proposition raisonnable qui contenterait tout le monde je crois."

Elle évita le regard de Lady McGee; cette dernière détestait sortir de son manoir et n'avait à priori rien à faire d'une goule médecin ou administrateur. Si Mary avait résidé à Glasgow depuis plus longtemps ou été parmi les amis du Prince, elle se serait elle-même proposée de tutorer l'Acolyte. Mais stratégiquement la Régente était le meilleur choix pour avoir la mainmise sur l'établissement hospitalier.

HRP :

Ambrosius comprit le ton sarcastique de Mary, mais ne se laissa pas démonté et raconta une anecdote. Le Prince aimait radoter sur son passé, il avait de toute façon un nombre incalculable d'aventure à conter à ses interlocuteurs. L'idée de Victoria de faire de son chef sa goule, chef qui était quelqu'un de très bien placé en ville d'après son statut, lui rapella sa demi-mésaventure avec sa première goule.

« De mon temps, j'ai pris en servante une certaine Lucrèce qui avait une position politique intéressante pour l'époque, mais elle s'est avérait être un mauvais investissement. Heureusement qu'elle avait d'autres qualités. Bref ... elle est toujours à mon service et est ma plus ancienne goule, je ne sais pas ce que je deviendrais sans elle. »

Puis le Prince se racla la gorge et reprit le fil normal de la discussions avant de partir dans des divagations sur la Renaissance et ses plaisirs. Il croisa gracieusement ses mains sur ses genoux et regarda Mary, qui avait proposé ce compromis.

« Votre idée n'est pas si mal Miss Forester. Je dirais même qu'elle est plus qu'intéressante. Ainsi, je laisse le temps à Miss Hayes de prendre ses marques en ville et sur son poste, sans l'encombrer d'une goule. Et Madame la Régente s'occupera de la transformation et la mettra à son service ? Quand dites-vous Lady McGee, Miss Hayes ? »

Le souverain aimait bien cette idée, après tout, la jeune miss Hayes venait à peine d'arriver en ville et sa demande était des plus entreprenante. Peut-être même trop pour la soirée de sa présentation ? Le Prince aimait les personnes qui avait de l'ambition, et il ne tiendrait donc jamais rigueur à quelqu'un d'avoir proposé quelque chose d'intéressant pour lui ou la communauté. Il affichait donc son éternel sourire et attendait les réactions des filles en face de lui.

Assise toujours sagement sur son canapé, Lady McGee écoutait sans montrer aucun signe de vexation. Elle ne paraissait nullement dérangée par la proposition de ses élèves, que ce soit celle de Victoria ou bien celle de Mary.

« Miss Forester à raison, je vais prendre le temps de réfléchir à votre proposition à tout les deux. En effet, j'ai déjà un bon nombre de serviteurs, et celui-là ne me sera directement pas de très grande utilité. Même si évidemment je vois à court et à long terme les avantages que cela pourrait apporter à notre Famille.»

Emily se leva et s'inclina bien bas devant son Prince. Son expression était toujours insondable, mais elle ne semblait pas mécontente de la situation. Elle se tourna ensuite vers Miss Hayes et lui tendit poliment une carte de visite. Dans une situation normale, ce geste aurait dû être accompagné d'un large sourire ou du moins d'une quelconque expression positive sur le visage. Mais, quand on connaissait Emily, il ne fallait pas s'attendre à tant de familiarité.

« Miss Hayes, je vous laisse ici que vous puissiez finir votre entretien tranquillement, je retourne au manoir avec Miss Forester. Je vous laisse le numéro de Kurt qui viendra vous chercher et vous déposer ou vous le souhaitez quand vous en aurez fini ici. »

Elle se retourna ensuite vers Mary et s'avança vers elle comme pour l'inviter à la suivre. Finalement c'était son élève qui lui permettait de s'échapper de la présentation de Victoria. Même si la régente tenait à être présente pour les premiers pas de chaque Trémère qui habitait sous son toit, elle détestait ce genre d'exercice. Son caractère assez asocial ressortait d'autant plus en face d'une personnalité aussi avenante qu'Ambrosius.

« Miss Forester, allons-y. Je suis sûr que sa Majesté se conduira très bien avec Miss Hayes, même si je ne suis pas là. Nous nous remettrons au travail en arrivant chez nous. »

Elle jeta un regard qui semblait être à peine plus dur que celui qu'elle affichait en général. À croire que le Prince avait conquit toutes les Trémères qu'elle lui avait présenté. Mais la régente se méfier surtout du fait que si l'une ou l'un de son clan craquait pour le souverain de la ville cela serait catastrophique pour le travail qu'ils devaient effectuer ensemble. Pour elle, la moindre attirance envers une autre personne était un fléau pour la concentration.

Elle se dirigea vers la sortie et ouvrit la porte, attendant que Mary soit avec elle, pour reprendre la direction de la sortie secondaire.

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Une fois le clan Trémère parti vers d'autres activités, le Prince se retrouva seul un bon moment. Il put ainsi réfléchir au cas d'Alan, se demandant comment il allait pouvoir le retrouver et surtout canaliser Morgane dans cette enquête. Il finit par se redresser et se lever de son bureau, il fallait qu'il se change un peu les idées.

Il décida donc d'aller "prendre la température" dans la salle de bar. Après tout il y été aussi chez lui et aller voir quelques humains s'amuser ne pourrait que l'occuper quelques minutes en attendant que son prochain rendez-vous arrive, s'il y en avait un évidemment.

Il parcourut rapidement les couloirs et déboucha dans la salle de bar.

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